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Délinquance numérique présumée OU "Quand les mesures de protection contre la copie incitent les gens à télécharger (légalement ?)"
jeudi 29 juillet 2010, par
C’est l’histoire de deux copines qui aiment le cinéma, achètent des DVD, en louent... Se les prêtent aussi... L’une d’elle a la télé, le lecteur de DVD, et tout. L’autre regarde les films sur un écran relié à son ordinateur : celle-ci est présumée délinquante.
L’autre jour elles se sont prêtées mutuellement un DVD. Une fois le DVD inséré, celle qui utilise son ordinateur a eu droit à un petit moment de cynisme : le défilement intégral du message traditionnel indiquant que le support ne peut être copié, etc. Et puis plus rien.
En droit belge, ce message n’est d’ailleurs pas complètement correct : si le diffuseur a bien le droit d’interdire les diffusions publiques de son œuvre, le détenteur d’un support a de son côté parfaitement le droit de faire et d’exécuter une copie privée. Simplement, les sociétés qui produisent ces supports n’aiment pas ça. Et vous en empêchent donc. Ou essayent de vous en empêcher. Du coup, cela empêche aussi parfois de simplement regarder l’œuvre. Bravo.
Le temps de perdre son temps à essayer de lancer la lecture du film, le temps de faire appel à mes services pour comprendre ce qui ne se passe pas bien, le temps que je découvre le pot au rose... On arrive à la conclusion fatale, en petit à l’arrière de la boite : ce support est muni d’un dispositif contre la copie. Ben voilà. En l’occurrence, il s’agit probablement d’une technique consistant à casser la structure des données enregistrées de telle manière qu’un lecteur DVD conventionnel ne soit pas affecté mais bien un lecteur/graveur, donc un ordinateur.
Adieu, soirée cinéma. Adieu ? Certainement pas. Au revoir, ça oui.
Un petit tour sur "http://thepiratebay.org", une recherche et trois clics, et en avant : le téléchargement se lance. Deux bonnes heures auront suffi. Ma copine pourra regarder son film.
C’est absurde, idiot et pour tout dire méchant.
A force de ne considérer les gens que comme des délinquants potentiels, les producteurs d’œuvres les amènent à adopter les comportements que justement ils craignent... Dans le cas de ma copine, c’est en plus parfaitement légal, du moment que le fichier téléchargé correspond bien à l’œuvre détenue, il correspond à une copie privée. Il restera d’une part à l’effacer en cas de transmission du support de l’œuvre à autrui, et d’autre part à ne pas le rediffuser via les divers réseaux d’échange.
Si vous pensez que je me trompe, n’hésitez pas à me le signaler. A ma connaissance, les personnes qui ont été condamnées (près de chez nous, en France) pour ce genre de faits l’ont été pour avoir partagé sur internet, pas pour avoir téléchargé quelque chose depuis l’internet. Voir par exemple ce dossier et les nombreux liens qu’il recense [1]. En fait, les personnes qui ont transmis depuis leur ordinateur, et via le réseau de téléchargement, les morceaux de fichiers qui réunis ont donné une copie d’un film, celles-là sont fautives, pas ma copine puisqu’elle détient bel et bien un droit du fait de la détention du support ...
On pourra me dire que ces réseaux sont bien fautifs puisque pour que la copie ait pu être récupérée, il fallait forcément que des gens la partagent illégalement. C’est possible. C’est leur problème. En l’occurrence et pour ma copine, cela a uniquement été l’occasion de rentrer dans son droit de voir l’œuvre présente sur le support qu’elle détenait. Si le diffuseur n’avait pas adopté une mesure de protection idiote, ce ne serait pas arrivé.
Je m’en voudrais de terminer ce billet sans préciser que ce sont bien les personnes qui partagent qui sont éventuellement fautives. En aucun cas le réseau. J’utilise Bittorrent régulièrement et le plus légalement du monde, pour télécharger mes distributions Linux et pour télécharger des médias qui ne sont pas diffusés avec les restrictions légales draconiennes que les majors croient être universelles... Par exemple, les musiques diffusées via Jamendo ou encore les vidéos proposées sur http://www.filmlibre.org. De manière générale, je repère les titres sur les sites puis je les télécharge, si possible, avec Bittorrent pour éviter de consommer les ressources de ces sites.
Toute dernière chose : je rencontre parfois des personnes qui n’imaginent même pas qu’il soit possible de diffuser des œuvres gratuitement. Eh bien, si. Même le le SPF "Economie" est au courant puisqu’ils en ont fait un sympathique résumé.
[1] j’avoue, j’ai pas tout lu mais je suis ce genre de questions depuis pas mal de temps et ce que j’ai lu confirme ce que je crois savoir...
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